De cette notion vague que l’on nomme style…
uite à une discussion sur l’excellent forum d’Outremonde, m’est venue l’idée d’écrire cet article sur le « style ». Loin d’être un guide ou encore une définition, c’est simplement un point de vue, en l’occurrence le mien, sur cette notion assez insaisissable qu’est le style d’un écrivain.
Cette difficulté de définition est sans doute due à ce que le style se refaire non seulement à la forme, mais est aussi intimement lié au fond de l’histoire exploité. De plus, cette notion est complexe dans sa référence…
En effet, on peut parler du style d’un auteur, mais cela veut-il dire que ce dernier n’en possède qu’un seul ? Loin de là, en réalité, il peut en changer à chaque texte qu’il écrit. Alors qu’est-ce le style ? Serait-ce la rémanence caractéristique que l’on trouve dans chacun de ses écrits ? Oui et non. En fait, pour tout vous dire, je ne connais pas la véritable réponse à cette question, et s’il n’existe qu’une seule réponse ou plusieurs.
Dans les tendances de la pensée littéraire, il me semble qu’il a toujours existé deux pôles opposés et pourtant connexes par la matière qu’elles traitent.
D’une part, il y a la tendance qui donne du crédit à l’histoire : seule l’histoire importe et pas vraiment la manière dont elle est racontée.
D’autre part, juste l’inverse : l’histoire en elle-même n’est pas importante. En réalité, elle est juste un prétexte pour la manière, qui définit tout l’art littéraire. Dans ce cadre, peut nous venir à l’esprit ce genre que certains écrivains affectionnent : l’absurde, qui ne recherche pas nécessairement le sens ou joue avec lui pour faire la part belle à la langue et ses raffinements.
Qu’est-ce que je pense de ces deux tendances ?
Je dirais qu’elles renferment chacune, un point important et que trouver un compromis au juste milieu entre elles serait la meilleure solution.
Aussi, pour en revenir au sujet qui nous occupe, le style, il va sans dire qu’il concerne en très grande part la manière dont l’histoire est racontée.
Lorsque l’on est apprenti auteur — étant donné que l’on se cherche, et que l’on ne possède pas encore notre style propre, ou plutôt que celui-ci ne s’est pas encore affirmé et n’a pas encore muri — deux choix s’imposent à nous :
§ Un, l’on se lance avec les rudiments que nous possédons de la langue et l’on écrit naturellement, tout en faisant des recherches afin d’améliorer notre rédaction.
§ Deux, l’on essaie de faire comme nos auteurs favoris.
Pour moi, sans hésiter, j’opte pour la première option, sans dénier le fait, qu’inconsciemment ou pas, je resterai influencé par mes lectures favorites. Cela dit, ce choix a d’intéressant qu’il permet un développement naturel du talent de l’écrivain, et fera que les écrits de ce dernier, peu importe « leurs qualités stylistiques », posséderont toujours cette touche d’authenticité.
De l’autre côté, celui qui essaie d’imiter un style élaboré d’un auteur affirmé, ne perdra pas pour autant en tout, puisque mine de rien cela permettra de l’améliorer. Mais avec une grande faille tout de même, et qui se ressentira aussitôt : un manque de maîtrise et d’authenticité.
Un exemple plus ou moins concret, ce sont les textes que l’on rencontre parfois au détour d’un blog, un site, ou forum, et même dans un livre édité, tiens, avec un style imbuvable par sa fausse sophistication, où les mots incompréhensibles tombent presque comme à l’ouverture d’une vanne. L’on se retrouve à rechercher la définition de mots cabalistiques à chaque phrase, et quand l’on finit de lire, on se rend compte que tous ces efforts ne menaient pas vraiment à grand-chose, puisque cela aurait pu être dit en de mots plus simples.
Oui, selon moi, la première vérité et la plus grande force d’un auteur (écrivain) sont qu’il écrit pour se faire comprendre et y arrive, et non pour étaler son talent inaccessible devant la masse ébahie et incompréhensive des lecteurs.
Comprenez bien que je ne crache pas sur la beauté de la langue, et ses subtilités, ni l’exercice presque infini que l’on peut faire avec les mots. Mais la beauté d’une œuvre, n’est-elle pas plus grande encore lorsque malgré sa complexité, elle reste déchiffrable par le plus simple esprit ?
En bref, mon avis sur le sujet reste dans ma propre citation sur le forum d’Outremonde :
« De plus en ce qui concerne le style, je préfère quelque chose de naturel (pauvre ou soutenu) ou alors d’expérimental (comme le fait souvent mon ami Gene Wolfe et on y ressent véritablement tout le plaisir qu’il a pris à écrire). Puisque s’il existe une chose qui me rebute le plus, c’est le « forcing » du style (il est alors ampoulé) et on sent tout de suite qu’il n’est pas naturel et ressort plutôt d’une espèce de snobisme intellectuel. »
Par ampoulé, j’ai voulu dire quelque chose d’un peu différent que le vrai sens de ce mot. En simple, tentative de faire du grand et y échouer en tombant dans le ridicule.
En mots de la fin donc, je dirais ceci :
« Écrivez comme vous le sentez venir, restez naturel, tout en travaillant et retravaillant votre plume, et surtout restez honnête avec vous-même. Si vous avez écrit quelque chose, et que l’ayant relu deux semaines plus tard, vous ne saisissez plus tout à fait son sens exact, ce qu’il y a anguille sous roche… »
Très humblement,
Votre serviteur, Alsem, qui se laisse porter au gré du Vent…